Comme en beaucoup de villes de France, le mal des Ardents fait rage à la fin du printemps, au moment où les dernières céréales qui ont passé l'hiver, ont pu être infectées par une moisissure. Mais la science ne le sait pas encore. A Chartres, on boit l'eau du puits à proximité de la cathédrale. A Paris on organise des processions en l'honneur de Sainte Geneviève. Ailleurs on invoque saint Antoine. Des ordres religieux -en particulier les Antonins- organisent les soins aux malades. A Arras, deux ménestrels sont à l'origine d'une bien belle histoire.
 La Sainte Chandelle
Dans la nuit du mercredi 24 au jeudi 25 mai de l'année 1105 (1), Itier, de Tirlemont dans le Brabant, fut favorisé d'une vision merveilleuse: une femme toute vêtue de blanc lui apparut en songe et l’invite à se rendre à Arras, auprès du prêtre Lambert. Il devra convaincre le religieux d’entre en prière et de faire confiance à la Dame qui lui confiera un cierge, dans la nuit de la vigile de Pentecôte. L’eau purifiée par quelques goutte de cire de ce cierge guérira les malades. La Belle Dame demande à Itier d’associer un autre ménestrel, Norman, du comté de Saint-Pol. Or une haine mortelle sépare les deux hommes.
Au cours de tournois alors que la jalousie et la haine s'étaient un jour glissées entre eux, Norman avait tué le frère d'Itier! Une inimitié profonde s'était donc établie entre ces deux Ménestrels et faisait craindre une nouvelle effusion de sang, s'ils se retrouvaient jamais ensemble. La Belle Dame apparut aussi à Norman et lui demanda la même chose qu’à Itier.
Les deux ménestrels se retrouvent auprès de Lambert. Cette réconciliation est reçue comme un don du Seigneur par l’intermédiaire de Notre-Dame. Ainsi Itier, Norman et Lambert se trouvent associés dans cette belle histoire, où guérison des cœurs et guérison des corps sont étroitement associés. La Vierge apparut dans la cathédrale, descendant de la voûte, portant un cierge qu’elle remet à Lambert.
On ne tarda pas à appeler le cierge miraculeux de sainte chandelle ou « Joyel ». Quelques gouttes de sa cire, répandues dans l'eau, donnaient à celle-ci des vertus curatives merveilleuses qui arrêtèrent l'épidémie du “mal des ardents ”. De nombreuses églises de Flandre et d'Artois reçurent des cierges, auxquels quelques gouttes de la sainte cire conféraient les mêmes propriétés miraculeuses. La sainte chandelle fut vénérée pendant six cents ans et, mêlée à de l'eau, elle guérissait les plaies, les inflammations, les ulcères.
En 1215, on éleva, sur la place du petit marché, une pyramide où ce cierge sacré fut déposé dans une châsse d'argent. La veille de la fête-Dieu et les quatre jours suivants, on allumait la sainte chandelle et on la montrait au peuple. L'église actuelle Notre-Dame des Ardents, sise à quelques pas du lycée d'État, a été édifiée au milieu du XIX° siècle. Le cierge y est toujours présenté dans son écrin. |